Vieux-Limoilou: des concentrations de particules fines «parmi les plus élevées» au Québec

Le rapport sur la qualité de l’air à Limoilou a été rendu public mardi


TAÏEB MOALLA et JEAN-LUC LAVALLÉE, Journal de Québec, mardi, 31 janvier 2023

Les concentrations moyennes annuelles de particules fines à la station du Vieux-Limoilou sont « parmi les plus élevées de la province », confirme un nouveau rapport sur la qualité de l’air qui fait plusieurs recommandations destinées notamment au port de Québec. 

Il s’agit-là d’une des conclusions d’un rapport de plus de 1200 pages remis vendredi au ministre de l’Environnement et rendu public mardi.  

Il a été rédigé par le Groupe de travail sur les contaminants atmosphériques à Limoilou, présidé par Jean-Pierre Charland. Mardi soir, pour présenter son pavé, ce dernier a animé une séance d’information, à laquelle ont pris part une trentaine de citoyens.  

Nickel : des dépassements notés 

Le volumineux document évoque l’enjeu du nickel qui est au cœur des débats depuis que le gouvernement du Québec a permis – depuis avril 2022 – de quintupler les seuils de concentration quotidiens.  

Même si le Groupe de travail n’avait pas le mandat de prendre position au sujet de cette hausse, il a néanmoins noté que « malgré des mesures d’atténuation mises en place, des dépassements de la norme sont encore observés, une situation inacceptable pour une partie de la population ». 

En utilisant rétrospectivement le nouveau seuil quotidien (70 nanogrammes par mètre cube), M. Charland note qu’il y a quand même eu 44 dépassements de cette limite à la station de Limoilou (entre 2011 à 2021) et 23 dépassements aux stations du port de Québec (entre 2015 et 2021). Au début de 2022, il y a eu cinq dépassements de cette norme, a-t-il précisé en soirée. Cela dit, le risque de cancer lié au nickel n’est pas établi, lit-on dans le rapport. 

Circulation automobile 

L’autre « contaminant prioritaire » que le Groupe a à l’œil est le dioxyde d’azote qui est « la forme d’oxyde d’azote qui a la plus grande toxicité ».  

Ses concentrations dépendent principalement de la circulation automobile. Santé Canada dresse un lien de causalité entre cette pollution routière et plusieurs types de maladies et de cancers. « On dépend peut-être un peu trop de nos voitures », a laissé tomber Jean-Pierre Charland en soirée tout en évitant de prendre position sur le 3e lien. 

Manutention et entreposage 

Le rapport fait une vingtaine de recommandations. Sur les quatre les plus urgentes, à mettre en place en moins d’un an, trois concernent le port de Québec. On préconise une « amélioration continue des procédures de gestion des poussières lors de la manutention et l’entreposage de solides en vrac au Port de Québec et dans la zone industrielle de Limoilou ».  

Un système de mesure en temps réel des émissions fugitives et l’amélioration continue des procédures de gestion des poussières sont suggérés.  

D’autre part, une réglementation sur le chauffage au bois, l’électrification des quais des navires de croisières et le nettoyage des voies de circulation font également partie des pistes suggérées. 

LA RESPONSABILITÉ DE TOUS, DIT MARCHAND  

La pollution atmosphérique dans Limoilou et la Basse-Ville de Québec est l’affaire de tous et non d’un « seul coupable », selon Bruno Marchand. 

À peine le rapport du Groupe de travail dévoilé, le maire de Québec a pris sa part du blâme, en point de presse, tout en refusant de pointer du doigt les autres responsables des émissions polluantes.  

« Nous sommes nombreux à avoir une part de responsabilité. La Ville de Québec va assumer ses responsabilités et elle va être très proactive », a-t-il insisté, disant avoir déjà identifié une quarantaine de pistes de solutions.

Selon le maire et la responsable de la qualité du milieu, Marie-Josée Asselin, la Municipalité est déjà sur la bonne voie, mais il y a encore du chemin à faire. Le nouveau centre de biométhanisation permettra d’améliorer la combustion de l’incinérateur, dans lequel les investissements majeurs se poursuivront. 

La Ville mise sur le tramway, un « élément important » du virage déjà amorcé. Elle continuera d’accroître sa flotte de véhicules électriques et hybrides. Elle compte planter 130 000 arbres d’ici 2029, ramasser la poussière de façon plus optimale lors du nettoyage des rues, être plus proactive pour annoncer les alertes au smog et continuera, jusqu’en 2026, à subventionner le remplacement de vieux poêles à bois qui émettent des particules fines.  

Les citoyens interpellés  

Les citoyens contribuent de façon importante à la pollution avec le transport routier et les poêles à bois non conformes, a rappelé le maire. « Comme citoyens, on va avoir des choix à faire si on veut être partie prenante de la solution, a insisté M. Marchand. Les solutions doivent être nombreuses et on doit tous se sentir concernés pour améliorer la qualité de l’air. »  

Le maire de Québec a refusé de lancer la pierre au port de Québec. D’après lui, « le port a une profonde volonté de collaborer, je la sens. Mario Girard (le PDG) s’est engagé à faire mieux et j’ai pleinement confiance en lui ». 

Avec la collaboration de Stéphanie Martin

CE QU’ILS ONT DIT 

« Le port n’aura pas le choix (de revoir ses pratiques) sans quoi il ne réussira pas à avoir l’adhésion de la communauté »Claude Villeneuve, chef de Québec d’abord.


« La Ville ne peut plus passer à côté, elle doit être ferme et exiger du Port de Québec que leurs activités soient sous couverts »Jackie Smith, cheffe de Transition Québec.


« Concernant précisément le nickel, le Port de Québec est conscient que la communauté est préoccupée et compte appuyer l’entreprise Glencore pour maintenir debonnes pratiques et l’amélioration continue des conditions d’opération »Le port de Québec.


« S’il y a des mesures d’atténuation importantes [qui s’adressent au Port], c’est parce que le Port a un rôle important à jouer dans la mauvaise qualité de l’air à Québec (…) Si les transports sont une source importante, il faut agir et c’est un argument de plus contre le troisième lien »Sol Zanetti, député de Québec solidaire.

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