Gabriel Béland, La Presse, publié le 31 mai 2022
(Québec) Montréal rêvait d’un « bain portuaire » pour célébrer ses 375 ans. Le projet est resté lettre morte et c’est finalement Québec qui inaugurera une zone de baignade dans son port dès cet été, juste à l’ombre de sa vieille ville.Publié le 31 mai
« L’idée de se baigner dans le bassin Louise à Québec remonte à 1991. Disons que c’est un vieux rêve qui se concrétise », s’est réjoui Michel Beaulieu, porte-parole de la Société des gens pour la baignade.
Le Port de Québec a annoncé mardi la création du projet Oasis, un lieu qui va s’articuler autour de la baignade au pied du Vieux-Québec. L’espace aménagé à même le bassin Louise existant va proposer plusieurs couloirs de longueur olympique (50 m) et une zone pour la baignade libre.
L’eau aura une profondeur de 9 à 14 pieds, mais des vestes de sauvetage seront prêtées. L’accès sera gratuit et l’ouverture est prévue pour la fin juin ou le début juillet.
L’ouverture de ce « bain portuaire » est le fruit de décennies de militantisme pour redonner aux citoyens l’accès aux berges. L’ouverture en 2016 d’une plage dans la baie de Beauport, un lieu plus excentré, a été une première victoire pour ces militants aquatiques.
« La baie de Beauport, c’était une première. Ça faisait depuis les années 70 que la baignade dans le Fleuve était interdite. En 2016, ç’a été un grand pas en avant », se souvient Michel Beaulieu.
« Les gens continuaient à penser aux années 70 et 80 quand tout allait au fleuve. On a investi des milliards au Québec pour traiter nos eaux et on voyait les résultats de ça. Quand les gens ont commencé à se baigner dans le fleuve à la baie de Beauport, ils ont réalisé que ç’avait changé. »
L’homme insiste pour dire qu’il n’a été informé d’aucun cas de problèmes de santé depuis 2016. La qualité de l’eau est d’ailleurs supérieure au bassin Louise par rapport à la baie de Beauport, note M. Beaulieu.
« Je pense que la principale surprise des gens qui vont venir se baigner cet été, ce sera la température de l’eau. Ils vont trouver que l’eau est chaude », assure le porte-parole de la Société des gens pour la baignade.
« On n’est pas à Tadoussac ! » ajoute-t-il.
Le Port de Québec veut faire de l’endroit un pôle d’attraction pour les touristes et les citoyens. L’idée est d’aménager un bar et un restaurant. « Cette idée cadrait très bien avec ce que nous voulions faire et permettait d’enrichir l’offre estivale », a indiqué le PDG du Port de Québec, Mario Girard.
Un exemple pour Montréal ?
Le concept de bain portuaire n’est pas nouveau. Copenhague a inauguré le sien en 2003. Il s’agit d’aménager un lieu de baignade dans un port. Québec serait la première ville en Amérique du Nord à adopter le concept.
À Montréal, l’administration de Denis Coderre avait annoncé en 2015 son intention d’aménager un bain portuaire au quai de l’Horloge. L’idée avait été reprise par Valérie Plante. Mais la Ville a abandonné le projet en 2020 à cause des forts courants à cet endroit et des activités portuaires.
« On a analysé la possibilité d’un bain portuaire au Quai de l’horloge dans le Vieux-Port, mais les résultats nous démontraient que c’était incompatible avec l’activité nautique et le courant du fleuve. On continue d’évaluer d’autres options », indique Alicia Dufour, porte-parole au cabinet de la mairesse de Montréal, Valérie Plante.
« C’est hallucinant la vision qu’ils ont à Québec », s’exclame André Bélanger, directeur général de la Fondation Rivières, organisme qui milite entre autres pour la baignade dans la métropole.
La Fondation Rivières milite pour la création d’un bain portuaire dans le bassin Jacques-Cartier du Vieux-Port. Il faudrait pour ce faire décaler la marine d’environ 150 mètres. La qualité de l’eau n’est pas un enjeu, insiste M. Bélanger.
« Ce n’est pas qu’à Montréal on n’a pas de bonnes conditions. L’eau est de bonne qualité. Il faudrait fermer quand il y a des débordements après de fortes pluies. On estime que ce serait ouvert 90 à 95 % du temps », dit-il.
Le Vieux-Port est géré par la Société immobilière du Canada. André Bélanger déplore le manque de concertation dans la métropole.
« Moi ce qui me fascine, c’est qu’à Québec ç’a été développé en collaboration avec la Société des gens de baignade, alors que nous on n’arrive même pas à avoir de communication avec les gens du Vieux-Port », dit-il.
À Montréal, on précise toutefois que plusieurs lieux sont disponibles aux Montréalais qi désirent se baigner dans le Fleuve, notamment à la Plage de Verdun, la Plage du parc-nature du Cap–Saint-Jacques, la Plage du parc-nature du Bois-de-L’Île-Bizard et à la plage Jean-Doré dans le Parc Jean-Drapeau.