Baignade au bassin Louise: le Port de Québec rencontrera les défenseurs du projet

Alexandre Duval, Radio-Canada, le 15 juin 2021

L’espoir d’un bain portuaire au bassin Louise, où les citoyens pourraient se baigner en plein coeur de Québec, renaît. Pour la première fois en 30 ans, l’Administration portuaire de Québec accepte de rencontrer ceux qui militent en faveur de ce projet.

Le Port n’a jamais accepté de nous rencontrer depuis 1991, ni pour la plage à l’époque ni pour le bain portuaire, explique Michel Beaulieu, porte-parole des Gens de baignade, le regroupement qui réclame un meilleur accès au bassin Louise.

Cette période de trois décennies, au cours de laquelle aucun rapprochement significatif n’a eu lieu, est sur le point de prendre fin. Le président-directeur général du Port, Mario Girard, rencontrera les Gens de baignade le 28 juin prochain.

M. Beaulieu ne cache pas son enthousiasme. Selon lui, le bassin Louise a toujours eu un potentiel incroyable pour la baignade et ce projet pourrait se réaliser en un claquement de doigts.Ça fait longtemps que c’est le bon moment!, dit M. Beaulieu.

« On est à la veille d’une merveilleuse première. » Michel Beaulieu, porte-parole des Gens de baignade

Pratiquement un lac

À l’ouest de la marina, une superficie équivalente à six piscines de taille olympique est complètement inutilisée. M. Beaulieu affirme que c’est pratiquement un lac aménagé au coeur de Québec.

Chaque année, les Gens de baignade y organisent un rassemblement pour démontrer que l’eau est d’excellente qualité, propice aux activités aquatiques.

Les dernières analyses ont été faites par la Ville de Québec, 42 jours en 2009, baignable 98 % du temps. Et depuis ce temps-là, la qualité de l’eau du Saint-Laurent, la seule source d’approvisionnement d’eau, s’est améliorée, avance M. Beaulieu.

Radio-Canada a tenté d’obtenir des données plus récentes auprès de la Ville de Québec, de l’Administration portuaire, des gouvernements provincial et fédéral, mais aucune de ces entités ne semble en détenir.

L’Administration portuaire a décliné notre demande d’entrevue. Par courriel, cependant, l’organisation indique que la baignade est une avenue envisageable, qui sera évaluée dans le contexte plus global du développement du bassin Louise.

Pour Michel Beaulieu, il est clair que l’endroit est sous-utilisé alors qu’il pourrait être le lieu d’une animation vraiment incroyable.

« Il n’y a personne dans l’eau et il n’y a personne autour non plus! Le lieu, qui est à deux pas du Vieux-Québec, est déserté. » Michel Beaulieu, porte-parole des Gens de baignade

Lors de la rencontre du 28 juin, les Gens de baignade présenteront donc les diverses facettes du projet qu’ils aimeraient voir le jour : deux bassins pour la nage, un parcours ludique sur l’eau, un restaurant flottant et une section de plage, notamment.

Des exemples dans le monde

L’année dernière, un projet de bain portuaire a été abandonné à Montréal. La décision n’avait rien à voir avec la qualité de l’eau, mais plutôt au courant du fleuve ainsi qu’à la cohabitation avec le port.

Ce revers n’affole pas M. Beaulieu, selon qui la situation à Québec est fort différente. Le bassin [Louise] est complètement à l’abri, c’est un endroit ultra calme.

Ailleurs dans le monde, des projets de bassins en eau libre ont vu le jour et connaissent un immense succès auprès des citoyens. C’est non seulement le cas à Copenhague, Bâle ou Oslo, mais également à Paris.

En 2017, la capitale de la France a inauguré le bassin de la Villette, à environ sept kilomètres au nord-est de la tour Eiffel. Le projet a coûté deux millions d’euros et s’est concrétisé en moins de trois ans, raconte la maire adjointe de Paris, Célia Blauel.

« Paris est une ville parfois compliquée et, pourtant, on y est arrivé! Donc allez-y (à Québec), c’est un très beau projet à réaliser. » Célia Blauel, maire adjointe de Paris

Mme Blauel explique que l’eau, qui provient du canal de l’Ourcq, est d’excellente qualité et n’a pas besoin d’être traitée. En quatre ans d’existence, le bassin a fermé seulement trois ou quatre journées, dit-elle.

Les Parisiens apprécient tellement l’infrastructure qu’il est maintenant question de créer un bassin sur la Seine pour 2025, juste après la tenue des Jeux olympiques.

Cette fois, à l’instar de Québec, Paris n’a pas pleine compétence sur les lieux, car deux entités sont responsables des berges et de la voie navigable. Mme Blauel est néanmoins convaincue que le projet se réalisera, car la volonté politique est au rendez-vous.

« Les autorités portuaires, de manière logique, n’auraient pas forcément envie que ça se fasse. C’est pour ça que la volonté politique est évidemment très importante pour que ces projets aillent jusqu’au bout […] Il faut y croire. » Célia Blauel, maire adjointe de Paris

Sur les cinq partis politiques en lice pour les prochaines élections municipales, trois manifestent un intérêt pour la baignade, soit Équipe Marie-Josée Savard, Démocratie Québec, ainsi que Transition Québec.

Québec Forte et Fière affirme ne pas être prête à se positionner sur cet enjeu. Pour sa part, Québec 21 n’a pas répondu au courriel de Radio-Canada.

Le Port invité à se réveiller

Quand on a des épisodes de chaleur extrême comme on a eu au début de la semaine [dernière], d’avoir accès à des cours d’eau pour se rafraîchir ou pour nager, ça nous apparaît être la moindre des choses, commente Alexandre Turgeon.

Le directeur du Conseil régional de l’environnement (CRE) pour la Capitale-Nationale croit que la COVID a changé le rapport des gens avec l’espace urbain. Il met d’ailleurs le PDG du Port de Québec au défi d’en prendre acte.

« Un moment donné, il faudrait que Mario Girard se réveille et s’active pour rendre disponibles davantage les espaces qui sont sous sa juridiction. » Alexandre Turgeon, directeur général du Conseil régional de l’environnement pour la Capitale-Nationale

Bouge-toi autant dans ces dossiers-là que tu t’actives dans les dossiers de développement [industriels], Mario, et peut-être qu’un moment donné, la population va être plus ouverte sur d’autres projets, poursuit M. Turgeon.

Michel Beaulieu croit également que le projet de baignade au bassin Louise bénéficie d’une conjoncture favorable. Tout ce qui manque, c’est le Port de Québec qui vient dire on est ouvert, on est prêt à s’asseoir et à voir comment on peut réaliser ça.

« C’est ce qu’on cherche à la réunion du 28 [juin]. On cherche à ce que la porte s’ouvre. » Michel Beaulieu, porte-parole des Gens de baignade

Le jour où il va y avoir de la baignade à la tête du bassin Louise, tout le monde va se dire « pourquoi on n’a pas fait ça avant?, affirme M. Beaulieu.

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