L’Université Laval doit se dissocier de l’écocide Laurentia

SOL ZANETTI
Député de Jean-Lesage, Québec solidaire
POINT DE VUE / Le partenariat entre l’Université Laval et le projet d’expansion du Port de Québec soulève l’indignation d’une part grandissante de la communauté universitaire. Étudiant-es, professeur-es, ancien-nes diplômé-es ont tour à tour exprimé avec justesse leur malaise profond envers cette démarche dans les dernières semaines.

La rectrice Sophie d’Amours a même senti le besoin de se défendre dans les pages du Soleil. Or, son rôle n’est-il pas plutôt d’être à l’écoute de sa collectivité sur un enjeu éthique d’une telle importance?

Le projet Laurentia, décrit par ses promoteurs comme le terminal portuaire le plus vert en Amérique du Nord, s’inscrit aux antipodes du développement durable et du «bien commun» que l’Université Laval prétend servir. Dans les faits, il s’agit d’un écocide qui ne reflète en rien ce dont les citoyennes et les citoyens limitrophes rêvent pour leur quartier.

L’agrandissement du port, s’il se réalisait, anéantirait une superficie équivalente à 72 terrains de football en milieux naturels. Selon le dernier rapport de Pêches et Océans Canada, le projet détruirait entièrement l’habitat du bar rayé (entre autres) et affecterait de manière irréversible l’écosystème rare et complexe de la baie de Beauport. Il contribuerait également à accentuer le trafic maritime sur le Saint-Laurent, lequel est responsable du déclin de nombreuses espèces protégées, dont les bélugas. Quand on sait que 68 % de la faune sauvage a disparu dans les 50 dernières années à cause de l’activité humaine, comment alors justifier un tel projet d’expansion industriel en bord de mer? À quel moment cesserons-nous de détruire de tels habitats marins? Lorsque le pourcentage d’animaux sauvages disparus aura atteint 75 %?, 80 %?, 90 %?

Dans une démarche classique d’écoblanchiment, le Port de Québec veut nous faire croire qu’il fait un pas en avant pour l’environnement. Il est vrai que le terminal sera automatisé et électrifié, mais les dommages collatéraux pendant et après la phase de construction seront majeurs: augmentation des émissions de GES dans Limoilou, où la qualité de l’air est déjà critique, augmentation du camionnage sur le boulevard Henri-Bourassa, augmentation des passages de trains à proximité des écoles et des lieux habités, restriction de l’accès au fleuve pour la population et défiguration permanente du paysage dans une ville que l’on qualifie pourtant, avec raison, de joyau patrimonial.

Pour inscrire l’Université Laval comme une alliée du bien commun, la rectrice ne devrait-elle pas mettre les connaissances de son institution au profit d’initiatives citoyennes, comme celle que propose le Conseil de quartier Maizerets, le Plaidoyer pour un Littoral Est écologique, social et économique? Ne devrait-elle pas écouter les nombreuses voix étudiantes et professorales qui s’élèvent pour dénoncer le partenariat entre leur université et le Port de Québec, lui rappelant que Laurentia dessert avant tout des intérêts corporatistes et purement mercantiles?

En se faisant complice de l’écocide Laurentia, l’Université Laval se met au service de compagnies à l’éthique fort douteuse. Rappelons qu’Hutchison Ports, l’opérateur du futur terminal de conteneurs, est basé aux îles Vierges, un paradis fiscal, que sa maison-mère est un conglomérat chinois transitant par les îles Caïmans (également un paradis fiscal) et se révélant également l’actionnaire principal de la pétrolière Husky Energy, l’un des plus gros émetteurs de gaz à effets de serre de la planète, notamment avec l’exploitation de sables bitumineux en Alberta. Croyez-vous sincèrement que ces gens-là ont une quelconque préoccupation pour l’environnement et le bien commun?

Poser la question, c’est y répondre. Au nom du bien commun, l’Université Laval et sa rectrice doivent se dissocier de l’écocide Laurentia.

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