Un projet fortement subventionné rend l’âme – Le terminal intermodal du géant américain CSX à Valleyfield n’a jamais décollé en presque 5 ans d’existence

Un terminal de transport de marchandises dans lequel les contribuables ont injecté plus de 19 millions $ fermera ses portes à Valleyfield en octobre, soit quatre ans et demi à peine après son inauguration en grande pompe.

« On a eu moins de demande. On a mis de l’argent là-dedans, on a fait des efforts du côté du marketing, mais ça n’a jamais levé comme on pensait. Finalement, ce n’était pas profitable d’opérer un centre comme ça », explique au Journal Bryan Tucker, porte-parole de l’entreprise ferroviaire floridienne CSX.

CSX a investi quelque 100 millions $ dans ce centre de transbordement qui permet de transférer des conteneurs arrivant par train des États-Unis sur des camions se rendant ensuite chez des clients dans l’est du Canada.

L’entreprise espérait ainsi générer du trafic sur sa ligne reliant Syracuse, dans l’État de New York, à Beauharnois. Devant l’échec du terminal de Valleyfield, CSX a mis en vente cette ligne l’an dernier.

Au moment de l’annonce du projet, en janvier 2013, CSX et le ministre des Transports de l’époque, le péquiste Sylvain Gaudreault, parlaient d’une infrastructure « stratégique » et faisaient miroiter la création de 337 emplois.

La valse des millions

Après tout, le terminal a une capacité de plus de 100 000 conteneurs par année. Mais il n’aura jamais employé plus d’une dizaine de personnes.

Aujourd’hui décrié pour sa mauvaise gestion, le Fonds vert, qui visait à réduire les émissions de gaz à effet de serre, a versé 6 millions $ au projet.

De son côté, le ministère des Transports a allongé 6,6 millions $ pour réaménager des routes et pour démolir un viaduc dans le secteur.

La Ville de Salaberry-de-Valleyfield s’est quant à elle endettée de 6,5 millions $ pour déplacer les voies ferrées de CSX hors de son centre.

La municipalité s’est toutefois remboursée en partie avec l’impôt foncier versé par CSX, qui s’élève à plus de 750 000 $ par année.

Entente avec le CN

Le maire de la localité, Miguel Lemieux, est évidemment déçu de la tournure des événements, sans toutefois s’alarmer.

« Il n’y aura plus de transbordement sur place, ce qui était un plus pour nous, on ne s’en cache pas, mais ce n’est pas la fin du monde non plus », affirme-t-il.

Pour continuer à servir ses clients, CSX a conclu une entente avec le Canadien National, ce qui signifie que les deux rivaux du rail ne se feront plus concurrence au Canada.

Les wagons de CSX en provenance de Philadelphie, de New York et du New Jersey pourront se rendre jusqu’à Toronto et Montréal en passant sur les voies du CN.

M. Lemieux demande à CSX de « collaborer » et d’accepter de vendre le vaste terrain de 355 000 mètres carrés à un « prix raisonnable ». Mais pour l’instant, l’entreprise ne s’engage à rien.

« CSX évaluera toutes ses options pour le site de Valleyfield », dit M. Tucker.

« Notre parc industriel est en pleine expansion, indique Miguel Lemieux. On a beaucoup de demandes pour des terrains dans ce coin-là et c’en est un beau qui pourrait être valorisé pour accueillir des entreprises et créer beaucoup d’emplois. »

Croissance économique

Le maire assure que l’insuccès du terminal intermodal n’a pas nui à la croissance économique de sa ville.

« Le port de Valleyfield bat des records avec des profits de un million $ l’an passé », se félicite-t-il.

La municipalité a récemment réussi à attirer un centre de distribution de l’entreprise britanno-colombienne OK Tire Stores et la plus grande serre de cannabis biologique au monde, un projet de la firme ontarienne The Green Organic Dutchman (TGOD).

De plus, Valleyfield croise les doigts pour que le projet d’usine de panneaux solaires de la société britannique Solargise, évalué à un milliard $, voie le jour sur son territoire.

LE TERMINAL INTERMODAL DE CSX À SALABERRY-DE-VALLEYFIELD

♦ Investissement : 100 M$

♦ Subventions : 19,1 M$

♦ Emplois prévus : 337

♦ Emplois réels : moins de 20

♦ Capacité : plus de 100 000 conteneurs par an

♦ Camions prévus par an : 66 000 

♦ Valeur des installations (selon l’évaluation municipale) : 38 millions $

♦ Superficie des installations : 355 000 mètres carrés

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