400 000 $ par année pour le pdg du Port

Annie Morin, Le Soleil, publié le 03 juin 2016

(Québec) La rémunération du président-directeur général du Port de Québec, Mario Girard, atteint désormais 400 000 $ par année.

L’information a été révélée lors de la réunion publique annuelle de l’Administration portuaire de Québec (APQ), tenue vendredi au terminal de croisières Ross-Gaudreault. C’est l’ancien député de Beauport-Limoilou, Raymond Côté, qui a posé une question sur la rémunération des administrateurs et du principal dirigeant.

La présidente du conseil d’administration, Marie-France Poulain, était prête. Elle a répondu que ses cinq collègues au conseil sont payés entre 25 000 $ et 35 000 $ chacun par année. Elle-même reçoit autour de 60 000 $ pour la présidence. Il y a eu environ 25 rencontres du conseil et de ses comités en cours d’année.

Quant à M. Girard, qui dirige les destinées du Port depuis 2011, il a reçu environ 400 000 $ en salaire et bonifications pour 2015. C’était la première année de son deuxième contrat de travail, d’une durée de cinq ans. À son arrivée en poste, M. Girard était payé 225 000 $ par année, salaire auquel s’ajoutait un boni de 25 % ou 56 250 $.

Son prédécesseur, Ross Gaudreault, a gagné 496 000 $ en 2010 et s’est mérité une prime de départ de 310 000 $.

«On a fait deux études de rémunération avec des marchés de référence et on s’est placé un peu en-dessous de la médiane. Vous comprendrez qu’il était beaucoup plus bas au moment de son embauche. Je pense qu’avec l’administration précédente, on avait fait un recul, alors on s’est repositionné. M. Girard a des objectifs également et il les atteint», a expliqué Mme Poulain, présentée comme la «patronne» par le pdg.

«C’est de bonnes pratiques comme conseil d’administration de s’assurer de la rétention de nos hauts dirigeants et d’avoir la bonne rémunération», a-t-elle ajouté.

L’APQ est un organisme fédéral autonome à gouvernance partagée. Ses opérations courantes s’autofinancent avec les revenus provenant de la location des terrains et infrastructures portuaires. Des subventions sont généralement requises, jusqu’à concurrence du tiers, pour les projets de développement.

Dans le rapport annuel 2015, le Port rapporte des revenus de 26 millions $, en baisse de 4,5 millions $ sur 2014 et 2013. Une perte a été enregistrée pour une deuxième année consécutive. Elle a atteint 2,8 millions $ l’an dernier, comparativement à 383 582 $ l’année précédente.

L’administration portuaire avait déjà annoncé en janvier que la quantité de marchandises manutentionnées a baissé en 2015. Il y en a eu pour 21 millions de tonnes, comparativement à 24 millions de tonnes en 2014 et 33,1 millions de tonnes en 2012, année record.

M. Girard s’attend à de la stabilité pour 2016 car le contexte économique mondial est toujours difficile et les prix de matières premières ne remontent pas vite. «Les compagnies minières souffrent. Les armateurs souffrent. Les opérateurs de terminaux connaissent également des ralentissements», a-t-il établi.

Qu’importe, le Port de Québec a besoin plus que jamais d’agrandir ses installations, estime son pdg, qui veut être prêt à rebondir au sortir de ce cycle qu’il qualifie de «naturel».

«De toute façon, même le terrain actuel qu’on a au port de Québec – lorsqu’il a été à pleine capacité, on a vu ça en 2012 – ne génère pas suffisamment de revenus pour permettre la restauration de nos actifs portuaires», a spécifié M. Girard. Environ 300 millions $ de travaux sont requis pour entretenir les infrastructures vieillissantes le long du fleuve à Québec et Lévis.

Actuellement le projet d’agrandissement Beauport 2020, qui prévoit l’allongement de la ligne de quais sur 610 mètres dans le secteur de Beauport, le remplissage des berges et le remodelage de la plage, est en évaluation environnementale. L’agence fédérale responsable a demandé en avril des précisions à l’étude de 10 000 pages déposée un mois plus tôt.

Le grand patron du Port n’est toujours pas en mesure d’annoncer quand les informations requises seront rassemblées. Des discussions ont lieu avec l’Agence canadienne d’évaluation environnementale. Une fois que l’étude d’impact environnemental sera jugée complète et recevable, une consultation publique doit encore être organisée.

Par conséquent, M. Girard ne peut dire si l’échéancier prévoyant le début de la construction en 2017, pour une mise en service en 2020, pourra être respecté. «Une fois qu’on aura répondu à toutes les questions de l’agence, on sera en mesure de dire si ce sera 2017 ou 2018. Pour le moment, il est un peu trop tôt.»

Le gouvernement fédéral a promis 60 millions $ pour la réalisation du projet de 190 millions $.

Toujours l’environnement

Le Port de Québec n’a pu échapper aux questions environnementales lors de son rendez-vous annuel avec les citoyens. Le pdg Mario Girard a mis la table en publicisant l’atteinte du niveau maximal de la certification environnementale de l’Alliance verte, programme créé à Québec pour l’industrie maritime nord-américaine. Seul le Port d’Halifax et Rio Tinto au Saguenay ont atteint cet ultime objectif avant l’APQ. «C’est le revirement le plus spectaculaire jamais vu de l’histoire», a relaté M. Girard, provoquant des rires sceptiques dans la salle. Une demi-douzaine de citoyens s’étaient déplacés pour poser des questions sur la qualité de l’air, l’accès au fleuve et les retombées économiques des projets futurs. Les dirigeants ont pris le temps de répondre à chacun d’entre eux, mais n’ont visiblement pas réussi à les convaincre de leurs bonnes intentions.

Note d’ASLB

Voici l’une des questions posées par ASLB et à laquelle le pdg du Port Mario Girard n’a pas su répondre:

La Corporation internationale d’avitaillement de Montréal planche actuellement sur un projet de terminal de carburant aéroportuaire situé dans le port de Montréal. C’est un projet similaire à Beauport 2020, mais qui utilise 10 hectares de terrains existants au lieu de 16 hectares de terrains à créer par remblaiement du fleuve. Même s’il est moins imposant et moins susceptible d’avoir des impacts négatifs sur l’environnement et la qualité de vie des gens que Beauport 2020, ce projet au port de Montréal sera soumis au BAPE, contrairement à Beauport 2020. Ce projet illustre par ailleurs la déficience en gestion intégrée du transport maritime des marchandises sur le Saint-Laurent. Vous justifiez Beauport 2020 en prétendant entre autres manquer d’espace, mais le projet au port de Montréal a pour but de « rapprocher le point de réception des navires-citernes à Montréal au lieu de Québec ».

La phase d’exploitation de ce terminal au port de Montréal générerait, selon le promoteur et une modélisation de l’Institut de la statistique du Québec, 20 emplois directs. En comparaison, en 1982, le Port de Québec estimait que le vrac liquide générait 1,7 emplois directs par hectare. Donc pour les 10 hectares du projet au port de Montréal, cela ferait 1,7 x 10 = 17 emplois. Que le nombre d’emplois qu’aurait estimé le Port de Québec en 1982 (17) soit similaire à celui (20) issu d’une modélisation faite en 2015 est tout à fait remarquable.

Maintenant, vous affirmez que la phase d’exploitation de Beauport 2020, qui sera aussi un terminal de transbordement de matières en vrac, et là, on sait que la forme solide ou liquide du vrac ne change pas dramatiquement les taux d’emplois par hectare, vous affirmez donc que Beauport 2020 générerait 1000 emploi-années au Canada (directs, indirects et induits) et que les deux tiers des retombées économiques canadiennes seraient captées ici, dans la région de Québec.

Si le nouveau terminal de vrac de 10 hectares au port de Montréal créera 20 emplois directs, combien d’après vous les 16 hectares de Beauport 2020 créeront-ils d’emplois directs ici dans la région de Québec?

Les commentaires sont fermés.