Le ministre fédéral de l’Environnement défavorable au projet Laurentia

JEAN-FRANÇOIS NÉRON, Le Soleil, 10 juin 2021

Le ministre fédéral de l’Environnement ne donne pas son aval au projet de terminal de conteneurs du Port de Québec parce qu’il entraînera des effets négatifs et importants. C’est maintenant au Conseil des ministres de trancher.

Tout pointait vers cette décision du ministre Jonathan Wilkinson rendu jeudi à la suite du dépôt du rapport de l’Agence d’évaluation d’impact du Canada (AEIC). Déjà, le rapport préliminaire de l’Agence rendu public à l’automne soulevait d’importants enjeux environnementaux liés aux habitats marins de certaines espèces, à la pratique de la pêche et à l’émission de particules fines dans l’air pouvant nuire à la santé humaine.

Le rapport final maintient son avis défavorable malgré l’ajout par le Port de mesures d’atténuation pendant la phase de construction comme celle d’exploitation. Ces mesures touchent principalement la qualité de l’air, la protection de l’écosystème marin, la circulation routière et ferroviaire et la protection de l’aire récréotouristique de la baie de Beauport.

«L’ensemble de ces mesures ne permettraient pas d’atténuer suffisamment les effets potentiels du projet pour rendre tous les effets résiduels non importants», juge l’Agence.

À la demande des citoyens mobilisés contre le projet depuis son annonce, l’AEIC a aussi analysé les activités de transport routier et ferroviaire associé au projet qui se déroulent dans l’arrondissement de la Cité Limoilou.

À ce sujet, elle écrit que Laurentia aura des «effets importants directs et cumulatifs sur la qualité de l’air et la santé humaine liés aux émissions de particules et de contaminants issus de la combustion de combustibles fossiles. Malgré la faible contribution du projet à la dégradation de la qualité de l’air, des contaminants atmosphériques seraient émis dans un milieu préalablement saturé et où des problèmes de santé liés à la qualité de l’air sont déjà connus.»

Comme le ministre Wilkinson détermine que la réalisation du projet est susceptible d’entraîner des effets négatifs et importants, il renvoie le dossier, comme la loi l’exige, au Conseil des ministres. C’est lui qui décidera si les effets négatifs relevés par l’Agence sont justifiables dans les circonstances. 

«La protection de l’environnement et de la santé des gens est au coeur des priorités de notre gouvernement. Le processus d’évaluation politiquement indépendant et rigoureux de l’Agence canadienne d’évaluation d’impact est essentiel à cet égard. (…) le Conseil des ministres tranchera en se basant sur les faits et la science», a déclaré le président du Conseil du Trésor et député de Québec, Jean-Yves Duclos.

Laurentia, un projet estimé à 775 millions$, a été dévoilé en 2019. L’Administration portuaire de Québec (APQ) annonçait avoir conclu une entente avec Hutchison Ports, le plus important réseau de ports dans le monde, et le Canadien National (CN) pour la construction et l’exploitation du nouveau terminal où devaient transiter 700 000 conteneurs par an.

À l’époque, le directeur du projet, Hugues Paris, était enthousiaste de présenter ce terminal tout automatisé dont plusieurs équipements sont entièrement électrifiés tandis que d’autres fonctionnent en mode hybride. Le but, disait-il, était de diminuer l’impact environnemental avec l’électrification du terminal de conteneurs, correspondant à une diminution de 40 % des gaz à effet de serre.

Le Port justifie son projet pour des raisons économiques. Les plus gros porte-conteneurs, une tendance dans l’industrie, ne peuvent remonter le fleuve jusqu’à Montréal. Québec devient donc le seul port pouvant les accueillir. Autrement, ils accosteront dans les ports de la côte Est américaine, entraînant une hausse du coût de transport pour les acheminer jusqu’au Québec, avance l’administration portuaire.

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