Québec en Cour d’appel pour faire appliquer sa loi sur les ports

Incapable d’imposer ses lois environnementales sur le territoire du port de Québec, le gouvernement québécois plaide sa cause devant les tribunaux. Après avoir été débouté en 2012, il fait désormais entendre ses arguments en Cour d’appel.

La cause trouve son origine dans un conflit vieux de dix ans entre le ministère de l’Environnement et IMTT, gestionnaire d’un terminal de vrac liquide dans le port de Québec. L’entreprise voulait construire un terminal et avait décidé d’ignorer la Loi sur la qualité de l’environnement et de se soustraire au BAPE.

En 2008, le gouvernement du Québec a déposé une demande d’injonction en Cour supérieure qui s’est soldée en 2012 par un jugement en faveur du Port.

Dans sa décision, le juge Gilles Blanchet faisait valoir que la Loi sur la qualité de l’environnement (LQE) exposait les projets en zone portuaire à une trop grande incertitude en raison notamment du pouvoir discrétionnaire « quasi absolu » qu’elle donne au ministre. Or, dans ses lois, le Parlement du Canada affiche une intention claire de « se réserver le dernier mot » dans l’éventualité d’un conflit, tranchait le juge.

Les sept réservoirs à l’origine du litige ont été construits depuis longtemps, mais le débat demeure d’actualité puisque le Port continue de faire fi de l’autorité du ministère de l’Environnement, notamment dans le dossier de la contamination de l’air en provenance des installations d’Arrimage Québec.

Quand le gouvernement a décidé de porter la cause en appel en 2012, le ministre du Développement durable de l’époque, David Heurtel, avait déclaré que le dossier allait « plus loin que le Port de Québec » et qu’il s’agissait d’un « dossier fondamental » sur l’applicabilité du processus d’évaluation environnementale québécois.

Un impact possible sur les gazoducs et les aérodromes

Mardi, les présentations portaient essentiellement sur deux sujets : le statut légal des terrains où se trouvent les installations d’IMTT et le partage des pouvoirs entre Québec et Ottawa dans le cadre de la Constitution.

Devant la Cour d’appel, l’avocate représentant la procureure générale, Me France Bonsaint, a notamment voulu mettre en question le statut légal du territoire sur lequel le fédéral prétend avoir un contrôle exclusif.

Cela a donné lieu à de longues représentations sur des textes remontant aux décennies précédant la confédération. La procureure a alors remis en cause le transfert des terrains concernés à la Couronne en 1867, ce que les avocats du Port ont contesté bec et ongles par la suite. La question est d’autant plus complexe que les terrains d’IMTT étaient jadis sous l’eau.

Sur le plan constitutionnel, les avocats du Port, de leur côté, ont souligné que l’intervention du gouvernement du Québec était une « entrave » à des compétences exclusives du Canada. « Le fait que l’APQ [Administration portuaire] ait le contrôle est le résultat d’une loi claire, a fait valoir Me Jean Lortie. C’est ce que le Parlement a voulu. »

En plus du Port et du gouvernement, les juges ont entendu mardi Nature Québec et le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE), venu plaider en faveur de la sécurité de la population. « Cette décision est majeure sur le plan constitutionnel », a déclaré Me David Robitaille, membre du conseil d’administration du CQDE et professeur de droit à l’Université d’Ottawa. Selon ces organismes, la décision de la Cour d’appel dans cette cause pourrait avoir un impact non seulement sur tous les dossiers qui touchent aux ports, mais également sur les pipelines ou encore les projets d’aérodrome.

Il est prévu que les audiences reprendront mercredi matin au Palais de Justice de Québec avec les plaidoiries des procureurs du gouvernement du Canada. À moins d’un imprévu, elles doivent se terminer au cours de la journée.

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