Arrimage Québec: avis de non-conformité en lien avec des poussières brunes

Annie Morin, Le Soleil, publié le 27 avril 2018

Arrimage Québec vient de recevoir un nouvel avis de non-conformité du ministère québécois de l’Environnement pour avoir omis de déclarer la dispersion de poussières brunes sur les glaces du fleuve Saint-Laurent au début de l’année. L’entreprise et le Port de Québec considèrent l’incident «mineur» et continuent de nier la compétence du gouvernement du Québec sur les terrains portuaires.

Les faits remontent au 25 janvier. Voici le compte rendu qu’en fait Frédéric Fournier, porte-parole du ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte au changement climatique (MDDELCC) : «Urgence-Environnement s’est rendu sur les lieux pour y constater présence de poussières brunes sur des glaces au port de Québec. En effet, lors du chargement du bateau vers 8h le matin, il y a eu une défaillance de l’équipement (convoyeur) provoquant un échappement de poussières d’oxyde de fer sur quelques glaces autour du bateau et entre le quai et le bateau. Ainsi, puisque Compagnie d’Arrimage de Québec n’a pas avisé sans délai le MDDELCC du déversement, un avis de non-conformité a été émis à l’entreprise le 20 avril dernier.»

Le Soleil a reçu des photographies prises ce jour-là par un témoin qui voyage régulièrement sur le fleuve. Le 25 janvier, il a aperçu un nuage noir émanant du terminal de vrac solide dans le secteur Beauport. Il a pris quelques clichés en passant près des glaces couvertes de poussières, puis les a publiées sur sa page Facebook. Mais il n’a pas contacté les autorités.

«Ce n’est pas vrai que tout est réglé. De temps en temps, ils [Arrimage] l’échappent encore et la poussière monte vers les quartiers ou ça s’en va vers le fleuve, ce qui n’est pas mieux. Ils font leur effort, mais qu’ils ne viennent pas nous dire que tout est parfait», commente cette personne, qui préfère ne pas être nommée. «Si ça n’a pas été rapporté, qu’est-ce qu’ils peuvent nous cacher d’autre?» demande-t-elle encore.

«Événement mineur»

Arrimage Québec a répondu on ne peut plus brièvement aux questions du Soleil, jeudi. «Il s’agit d’un événement mineur sans conséquence. Notre entreprise en a évidemment informé le Port et les autorités concernées», nous a-t-on fait savoir dans un courriel reçu en fin de journée.

La porte-parole de l’Administration portuaire de Québec (APQ), Marie-Andrée Blanchet, a été plus loquace. Elle a expliqué qu’Arrimage Québec a cessé les opérations de transbordement le 25 janvier après avoir constaté la présence de résidus sur les glaces. Environnement Canada a été avisé ainsi que la Garde côtière canadienne. C’est cette dernière qui aurait informé son réseau d’alerte, qui inclut le MDDELCC. Un inspecteur provincial s’est déplacé sur les lieux.

Les opérations ont repris le lendemain «sous la supervision de l’APQ et de QSL [Arrimage Québec] et suite à la mise en place de mesures correctives : déglaçage des racloirs et couverture d’une partie du convoyeur», a précisé Mme Blanchet.

«Les procédures du Port de Québec ont été respectées et suivies à la lettre. L’arrêt des opérations et la remise en service ont été effectués à la satisfaction du Port de Québec. Il s’agit d’un incident mineur», a-t-elle conclu.

La procédure de signalement environnemental de l’APQ prévoit que le gouvernement du Québec est interpellé seulement si un incident a des retombées en-dehors du territoire portuaire.

Des précédents

Ce n’est pas la première fois qu’Arrimage Québec a maille à partir avec le ministère de l’Environnement du Québec. Des avis de non-conformité lui ont été transmis à au moins deux reprises, en novembre 2012 pour un épisode de poussière rouge ayant mené à un recours collectif et en avril 2013 pour pollution atmosphérique. Le directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) a également émis en décembre 2014 un constat d’infraction pour entrave au travail d’un fonctionnaire qui voulait enquêter sur une plainte similaire.

Le principal locataire du port de Québec conteste juridiquement tous ces constats et la compétence du Québec sur les terrains portuaires. Une cause a été inscrite en 2012 après la réception d’avis de non-conformité pour l’érection sans certificat d’autorisation des silos de granules de bois — aujourd’hui vides — à l’anse au Foulon.

Elle est toutefois subordonnée à une contestation juridictionnelle semblable entreprise par l’Administration portuaire de Québec et le gestionnaire du terminal de vrac liquide IMTT-Québec. Un juge de la Cour supérieure leur a donné raison en septembre 2016, mais le Québec a fait appel car il veut faire respecter ses lois dans les ports. La suite devrait être entendue en Cour d’appel en décembre, soit plus de deux ans plus tard. Les deux parties ont déjà manifesté leur intention de débattre jusqu’en Cour suprême.

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