Port et pétrole

Karine Gagnon, Journal de Québec, publié le 11 juin 2015

Le Port de Québec nous a habitués, ces dernières années, à de mauvaises surprises et à la loi de l’Omerta. Pourquoi lui ferait-on confiance lorsque son pdg écarte toute possibilité de terminal pétrolier en lien avec l’agrandissement de ses installations?

C’est la question très légitime que se pose l’opposition à l’hôtel de ville de Québec, qui a rencontré les médias mercredi pour réclamer que le port soit soumis au BAPE. Inquiets, le chef Paul Shoiry et les conseillers Anne Guérette et Yvon Bussières voulaient faire le point sur la «relation préoccupante que la Ville entretient avec le Port de Québec».

Le chef Paul Shoiry s’inquiète de voir que le port faisait clairement référence au pétrole dans le plan initial de son projet de 500 M$, qui prévoit l’agrandissement de ses quais et l’aménagement d’une plage et d’un bassin pour la baignade.

L’opposition a parlé à des gens de l’industrie, qui lui ont affirmé qu’un duc-d’Albe servait nécessairement pour le pétrole. Plusieurs médias, dont Le Devoir, ont en effet relevé, ces derniers mois, les passages suivants dans une présentation écrite du projet par le port: «Avantage hautement stratégique, le duc-d’Albe offrira une solution compétitive pour le Port de Québec afin de devenir un point de sortie pour les exportations de produits pétroliers canadiens.»

Plus loin, on pouvait lire aussi que les nouvelles installations portuaires «consolideront la capacité canadienne d’exportation».

Consultations prévues

Étrangement, ces lignes ont disparu de la présentation du projet depuis, comme toute référence au pétrole. Le port a également fait une mise au point écartant toute possibilité d’accueillir un terminal pétrolier. Le projet a été scindé en deux phases, a expliqué Mario Girard, pdg, et seule la première a été présentée au fédéral.

La deuxième phase comprend la construction d’un duc-d’Albe, système de pipelines sous-marins qui évite aux navires d’accoster en les approvisionnant en vrac liquide. Il n’y a toutefois pas d’échéancier pour cette phase.

Le Port se défend en affirmant que son nouveau projet de terminal sera soumis aussi à la consultation publique. Mario Girard l’avait d’ailleurs évoqué lors de sa présentation à l’hôtel de ville, il y a deux semaines, dans le cadre des demandes de la région en prévision de la campagne électorale fédérale.

Neutre?

Doit-on vraiment être rassuré de savoir que le port va lui-même mener des consultations? Il fera quoi des préoccupations et des résultats? Peut-il vraiment être neutre alors qu’il s’agit de son propre projet?

L’opposition n’est pas seule à s’inquiéter des pouvoirs du Port. Lors de sa plus récente visite, le chef du NDP Thomas Mulcair lui avait reproché de ne pas respecter son environnement.

La meilleure façon de s’assurer que le Port se conforme aux lois provinciales et à la réglementation municipale apparaît être celle de soumettre son projet au BAPE. L’organisme détient l’expertise et les compétences et est respecté par la population.

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