Rejet du projet Laurentia: «C’est une claque dans le front», selon Pierre Dolbec

Kathleen Lavoie, Radio-Canada, 2021-06-30

Ardent partisan de Laurentia, l’homme d’affaires Pierre Dolbec estime que le gouvernement fédéral fait fausse route en rejetant le projet de terminal de conteneurs intermodal du Port de Québec.

Pour le président de Dolbec International, le projet Laurentia n’est pas seulement essentiel au développement économique de Québec, mais de tout le Canada.

J’ai toujours dit que ce projet-là, c’était majeur pour Québec, pour la province, pour le Canada, parce que c’est tout simplement l’amélioration de toute la chaîne d’approvisionnement et de distribution de nos entreprises. C’est une claque dans le front économique, purement et simplement, a-t-il indiqué au micro de Première heure mercredi.

Pierre Dolbec n’hésite pas à parler d’un manque de vision du gouvernement pouvant avoir des conséquences importantes sur le développement économique du pays.

On a deux ports actuellement qui fonctionnent bien, à Montréal et Contrecoeur, mais qui sont limités au niveau des capacités parce que les gros porteurs ne peuvent pas y aller.

« On avait une chance en or d’avoir ici à Québec un port qui serait capable d’accepter ces porteurs-là […] et qui auraient donné une accessibilité au marché du Canada supplémentaire que ce qu’on a actuellement. » Pierre Dolbec, président de Dolbec International

L’homme d’affaires note une disparité dans la façon qu’ont été évalués les projets de Québec et Contrecoeur, qui sont tous les deux aux prises avec une problématique de protection d’une espèce de poisson.

Chaque port mentionné, que ce soit Contrecoeur ou Québec, a un problème avec un poisson donné. Le hic, c’est que celui de Montréal a plus de problématiques qu’ici et c’est nous autres qui nous faisons bloquer pendant que Contrecoeur continue. Je ne comprends pas, a dit celui qui porte également le chapeau de président de la Corporation des parcs industriels du Québec (CPI).

Une décision politique

Selon Pierre Dolbec, la décision du gouvernement Trudeau, avec le spectre d’une élection fédérale, se veut éminemment politique.

C’est une décision politique, totalement. Parce qu’il n’y a pas de logique du tout.

Le président de Dolbec International constate que le Port de Québec a mis en place de nombreuses mesures d’atténuation sur le plan environnemental et qu’il est prêt à poursuivre le travail afin d’obtenir l’approbation de l’Agence d’évaluation d’impact du Canada, tout comme le fait actuellement le Port de Contrecoeur.

Les deux ports concernés, Contrecoeur et Québec, ont une problématique similaire. Celle de Contrecoeur n’est pas plus réglée, en autant que je suis concerné, et c’est drôle, le projet avance. Ici, le projet n’avance plus.

« Je dis tout simplement de laisser le projet continuer d’avancer, au même titre que Contrecœur le fait. Et les deux ports vont continuer d’améliorer tout ce qu’il faut pour l’acceptabilité versus l’environnement. » Pierre Dolbec, président de Dolbec International

Le consommateur, grand perdant

Si Laurentia ne se réalise pas, ce sera le consommateur qui sera grand perdant, croit Pierre Dolbec, qui juge que la facture lui sera refilée.

C’est assuré. Il faut comprendre que quand on a des problèmes au niveau de la chaîne d’approvisionnement et que ça amène des coûts supplémentaires, c’est sûr que les entreprises, sur le coup, vont les absorber. Mais en bout de ligne, ils le repassent tout simplement au consommateur. C’est pour ça que je trouve ça désolant et de valeur.

Selon l’homme d’affaires, l’économie qui serait faite à la caisse par les consommateurs est indéniable. Il en tient pour compte la capacité des gros porteurs qu’aurait pu accueillir Laurentia.

On s’en va dans une ère où les porteurs, c’est du 18 000, 12 000, 20 000 conteneurs. Et ces bateaux-là, avec toutes les nouvelles façons énergétiques qu’ils ont, ils sont aussi performants que des plus petits bateaux qui transportent 2500 conteneurs. Imaginez-vous le coût de revient? Vous avez 12 000 unités sur un bateau qui performe aussi bien qu’un bateau à 2500.

La logique économique derrière Laurentia est si forte aux yeux de Pierre Dolbec qu’il s’engage à continuer de défendre le projet. Et il n’est pas le seul. Selon l’homme d’affaires, le Port de Québec n’a pas dit son dernier mot dans ce dossier.

Je pense que Laurentia est réalisable. […] J’ai parlé avec des gens du Port hier et ils m’ont dit qu’ils allaient reprendre le dossier et le représenter. C’est assuré. Au niveau de la communauté des gens d’affaires, je vais continuer à me battre pour que ce projet-là se réalise, a-t-il conclu.

Un autre projet, c’est aussi ce qu’espère voir émerger le maire de Lévis, Gilles Lehouillier. Lui et son équipe municipale étaient en faveur du projet Laurentia. Néanmoins, il prend acte de la décision du gouvernement fédéral et la respecte.

Il faut respecter les décisions que les pouvoirs publics prennent. Ils ont été élus démocratiquement alors ils prennent des décisions dans l’intérêt des collectivités, considère-t-il.

L’élu ajoute qu’il est désormais nécessaire de concilier développement économique et critères environnementaux.

On est en faveur du développement, mais il ne doit pas se faire à tout prix. De plus en plus, le volet environnemental prend de l’importance dans certains projets.

Le ton est moins résigné du côté de Geneviève Guilbault, vice-première ministre et ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale.

On est très très déçu que le gouvernement fédéral abandonne le projet Laurentia, commente-t-elle, parce que de ce fait, il abandonne aussi plein de gens d’affaires de Québec.

La ministre avoue avoir du mal à digérer la position d’Ottawa.

C’est difficile pour nous de comprendre comment on ne peut pas souhaiter un deuxième terminal sur notre Saint-Laurent, ici au Québec, pour faire entrer des marchandises qui de toute façon vont devoir entrer ailleurs. Ce qui fait que c’est laisser la place aux États-Unis ou à d’autres endroits.

Pour sa part, la ministre fédérale du Développement économique et des Langues officielles, Mélanie Joly, met en exergue l’intérêt de la population locale.

Il faut que la santé des gens de la région, proche de Beauport, soit protégée. Tout comme il faut que notre faune, notre flore soit également protégée. C’est la base!

Pour autant, elle ne ferme pas la porte à d’autres partenariats.

On est convaincu qu’il y a des gens intelligents ici à Québec qui vont nous arriver avec d’autres bons projets et moi, ça va me faire plaisir de les aider et de les soutenir.

L’appel est lancé.

Avec les informations d’Alexandre Duval et de Pascal Poinlane

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