Laurentia échoue au test de l’évaluation environnementale

L’Agence d’évaluation d’impact du Canada maintient que le projet de terminal de conteneurs aurait des effets négatifs importants sur la santé humaine et l’écosystème de la baie de Beauport.

David Rémillard, Radio-Canada, le 10 juin 2021

Le Port de Québec, malgré un délai et la bonification de ses mesures d’atténuation, n’a pas réussi à convaincre l’Agence d’évaluation d’impact du Canada (AEIC) de recommander la réalisation du terminal de conteneurs Laurentia dans la baie de Beauport.

L’agence fédérale a dévoilé son rapport final ce jeudi. L’organisation, qui évalue depuis 2015 les différentes moutures du projet d’expansion de l’Administration portuaire de Québec (APQ), arrive aux mêmes conclusions que lors de son rapport préliminaire, paru en novembre 2020.

L’AEIC est d’avis que Laurentia, qui consiste en l’ajout d’une ligne de quai en eau profonde de 610 mètres, aurait des effets environnementaux négatifs importants, directs et cumulatifs.

Selon le rapport, ces effets se feraient sentir sur la qualité de l’air, la santé humaine, l’écosystème de la baie de Beauport, les poissons, l’utilisation traditionnelle de l’habitat par les communautés autochtones et les activités socioéconomiques, comme la pêche récréative ou commerciale, ainsi que les activités de plein air.

Un plan bonifié qui ne suffit pas

Le Port de Québec, qui avait critiqué un « rapport incomplet » l’automne dernier, avait demandé un délai supplémentaire de 60 jours afin de produire de nouveaux documents en vue du dépôt du rapport final de l’AEICAgence d’évaluation d’impact du Canada. Délai qu’il a obtenu au début de janvier et qui lui a permis de produire un plan de mitigation, présenté en avril.

Ce plan comportait une quarantaine de mesures d’atténuation ou de compensation supplémentaires. Or, même en tenant compte des propositions bonifiées du Port de Québec, lequel a récemment promis un projet carboneutre, l’Agence maintient la même analyse qu’il y a sept mois.

« L’ensemble de ces mesures ne permettraient pas d’atténuer suffisamment les effets potentiels du projet pour rendre tous les effets résiduels non importants. » Extrait du rapport de l’Agence d’évaluation d’impact du Canada

Cet avis négatif de l’AEICAgence d’évaluation d’impact du Canada est en phase avec les analyses de trois ministères fédéraux qui ont eu à se prononcer sur le projet. Pêches et Océans Canada, Environnement et Changement climatique Canada ainsi que Santé Canada ont tous maintenu leurs avis défavorables à Laurentia, malgré les propositions bonifiées de l’APQ.

Dans le cas Pêches et Océans Canada, on estime que l’aménagement des infrastructures et des activités du terminal pourraient entraîner la perte et la modification d’habitats rares, complexes et de grande valeur. On juge qu’aucune mesure d’atténuation ou de compensation ne permettrait de récupérer ce qui serait perdu.

Santé Canada et Environnement Canada formulaient tous deux des réserves sur les contaminants projetés par Laurentia, lesquels s’ajoutent à des taux déjà élevés dans le secteur visé par le projet. L’AEICAgence d’évaluation d’impact du Canada retient leurs arguments.

Malgré la faible contribution du projet à la dégradation de la qualité de l’air, des contaminants atmosphériques seraient émis dans un milieu préalablement saturé et où des problèmes de santé liés à la qualité de l’air sont déjà connus, peut-on lire dans le rapport.

Aucune évaluation environnementale provinciale n’a été réalisée, puisqu’il s’agit d’un terrain fédéral. L’AEICAgence d’évaluation d’impact du Canada précise qu’elle a travaillé en collaboration avec le ministère québécois de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques.

Le gouvernement Legault avait quant à lui donné son appui clair au projet l’automne dernier, avant même le dépôt de l’étude du fédéral.

Décision à venir

Le rapport de l’AEICAgence d’évaluation d’impact du Canada est désormais entre les mains du ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Jonathan Wilkinson. Ce dernier avait deux options selon la loi, soit d’autoriser le projet ou de transférer la décision au Conseil des ministres du gouvernement Trudeau.

Selon le cabinet du député de Québec, Jean-Yves Duclos, le ministre a choisi la deuxième avenue. Aujourd’hui, en raison de l’importance des impacts identifiés dans le rapport final de l’Agence, mon collègue, le ministre Wilkinson, a pris la décision de référer ce dossier au Conseil des ministres qui tranchera en se basant sur les faits et la science, a-t-il déclaré par voie de communiqué.

La décision finale sera rendue ultérieurement.

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