Le terminal de grains inquiète le voisinage de l’anse au Foulon

Sébastien Tanguay, Radio-Canada, publié le 7 février 2021

Le voisinage de l’anse au Foulon craint que l’activité du nouveau terminal de grains nuise à la quiétude et à la bonne qualité de l’air du secteur. Les copropriétaires des Jardins Mérici demandent maintenant au Port de Québec et à Sollio, l’ancienne Coop fédérée, de respecter leurs propres engagements et d’atténuer les effets néfastes de leur projet.

Une étude publiée en mai dernier et réalisée par SNC-Lavalin montre que le bruit et la pollution émis par les installations portuaires situées à l’anse au Foulon dépasseront les normes établies par le gouvernement et la Ville de Québec.

On n’est pas en guerre contre le Port de Québec, c’est notre voisin, assure Gérard Grégoire, le porte-parole du Consortium des Syndicats de copropriété des Jardins Mérici, qui comprennent 1300 logements en surplomb des installations portuaires. Mais à moins d’un kilomètre des quais de l’anse au Foulon, il y a 2000 ou 3000 personnes qui vivent là à plein temps.

Le va-et-vient des camions, des trains et des navires inquiète les résidents du secteur. La manutention et le nettoyage des grains aussi, tout comme le transbordement de la marchandise, qui devra parfois s’effectuer de soir.

«Les études d’impact montrent clairement qu’ils [le port et Sollio] sont en dehors des normes environnementales. Ils dépassent les niveaux de bruit fixés par les normes à la fois du gouvernement du Québec et de la municipalité de Québec. Et du côté des poussières fines, on est presque à la limite, mais toutes les sources d’émission de poussières fines n’ont pas été comptées.» – Gérard Grégoire, porte-parole du Consortium des Jardins Mérici

Sollio, dans un courriel envoyé à Radio-Canada, insiste que les activités du terminal ne dépasseront pas les seuils fixés par les différents paliers de gouvernement.

Selon l’entreprise, une étude réalisée en 2018 montre que le terminal de grain, qui a modélisé toutes ses sources de bruit, indique qu'[il] ne dépassera pas les niveaux de bruits décrits dans les valeurs guides.

30 jours de consultation

Les promoteurs ont tenu une période de consultation de 30 jours, en juin 2018. Il faut dire que c’était une consultation assez rapide, se rappelle Gérard Grégoire. À ce moment-là, ce qu’on avait vu dans les conclusions de l’étude, c’est qu’ils ne dépassaient pas les normes ni de la municipalité ni du gouvernement du Québec.

Par contre, en fouillant la documentation de 300 pages après les consultations, certains citoyens ont remarqué que les annexes dessinaient une autre réalité.

On a découvert que, un, ils ne comptaient pas tous les bruits, et deuxièmement, ils ne comptaient pas toutes les émissions de poussières fines, indique le porte-parole.

Même à ça, ils dépassaient les normes de bruit et ils étaient presque à la limite des poussières fines.

Sollio assure avoir pris toutes les mesures nécessaires pour respecter les normes.

Il est faux de dire que toutes les sources n’ont pas été comptées dans notre étude, maintient l’entreprise. Elle entend limiter au maximum les émissions sonores entre 22 h et 6 h, proposant de cloisonner les équipements générant le plus de nuisances sonore.

Les poussières fines feront aussi l’objet d’une vigilance particulière, assure Sollio.

«Les principales sources de matières particulaires du projet sont liées à la manutention et au nettoyage du grain. Ces émissions sont captées par des systèmes d’aspiration et l’air chargé de poussières est épuré par des systèmes de dépoussiérage à sacs filtrants à haute performance avant d’être rejeté à l’atmosphère.» – Sollio, dans un courriel envoyé à Radio-Canada

Toutefois, un jugement de la Cour d’appel du Québec, rendu à l’automne 2019, indique que le Québec ne pouvait pas faire appliquer l’ensemble de sa législation environnementale au Port de Québec.

Ce que la Cour dit, c’est que le Port de Québec n’a pas besoin de demander l’autorisation pour faire des projets, explique Gérard Grégoire. Je pense qu’on ne devrait pas hésiter à faire respecter nos normes, point final, renchérit-il.

Retrait des subventions demandé

Érigé au coût de 90 M$, le terminal de grains de Sollio s’appuie sur la conversion des deux dômes blancs construits par Rentech en 2013, qui accueillaient des granules de bois jusqu’à la banqueroute de l’entreprise.

Québec a versé près de 23 M$ de subventions pour aider à la réalisation du projet.

Gérard Grégoire demande au gouvernement de faire respecter ses propres règles. Il veut aussi que le ministère des Transports utilise son levier financier et retire les subventions accordées tant que l’installation ne se conformera pas aux normes.

Le souci, c’est que c’est une incohérence à peu près totale, dit-il. On subventionne et dans les conditions d’octroi des subventions, on dit que les projets doivent respecter les lois et les règles en vigueur au Québec. On a demandé si ça concernait les normes environnementales : oui, ça concerne les normes environnementales.

«Le programme de subventions prévoit même que si les normes ne sont pas respectées, le ministre peut retirer les subventions, même celles qui ont déjà été versées.» – Gérard Grégoire, porte-parole du Consortium des Jardins Mérici

Les résidents ont enduré sans broncher une pollution sonore infernale pendant la durée des travaux, dit Gérard Grégoire.

À un moment donné, on ne peut pas empêcher les gens de construire, concède-t-il.

Le Port de Québec et Sollio se sont engagés à mettre en place des mesures pour atténuer les effets négatifs du projet pour les résidents du secteur dans un document datant de 2018 (Nouvelle fenêtre).

Toutefois, depuis la parution de l’étude réalisée par SNC-Lavalin en mai dernier, le Consortium des Jardins Mérici a demandé de poursuivre le dialogue avec l’administration portuaire de Québec (APQ).

Sollio indique être en contact régulier, depuis le début, avec les citoyens à travers l’APQ pour favoriser la cohabitation en réglant les problèmes au fur et à mesure.

Le Port de Québec n’a pas répondu à nos demandes d’entrevue.

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