Radio-Canada, publié le 10 février 2017

Le Port de Québec a grandement sous-estimé les impacts du projet Beauport 2020 sur l’environnement et la qualité de vie des citoyens en plus de gonfler les retombées économiques qu’il générera, affirme Nature Québec dans un rapport publié vendredi.
L’organisme a passé au peigne fin l’évaluation environnementale effectuée par l’Administration portuaire de Québec (APQ) pour son projet d’agrandissement dans la baie de Beauport.
Son rapport, qui a été réalisé grâce à une subvention octroyée par l’Agence canadienne d’évaluation environnementale, remet en question les résultats de l’évaluation environnementale de l’APQ et la méthodologie utilisée.
Sédiments
Nature Québec note que l’évaluation réalisée par le Port minimise le volume de sédiments contaminés qui seront extraits lors des travaux de dragage.
L’étude du Port repose sur des échantillons de sédiments recueillis à 8 pouces (20,32 cm) de profondeur, alors qu’il prévoit draguer jusqu’à 16 mètres, là où la concentration de sédiments contaminés est plus élevée, souligne Nature Qubec.
Christian Simard, directeur général de Nature Québec, soutient par ailleurs que la méthode suggérée par le Port pour contenir et stabiliser les sédiments qui seront extraits est inadéquate, car elle n’est pas adaptée aux sites où il y a des marées, comme c’est le cas à la baie de Beauport.
« Le Port propose une technologie qui n’est absolument pas éprouvée de stabilisation, solidification où on n’élimine pas les sédiments contaminés, on les met dans une espèce de pain, de monolithe et on l’installe dans le quai et il est reconnu que quand on fait ça, il faut mettre ça dans un endroit absolument pas soumis aux intempéries. »
Selon Christian Simard, il est « utopique » de croire que les sédiments pollués ne seront pas rejetés dans l’environnement.

Poissons menacés
Le directeur général de Nature Québec reproche en outre au Port d’avoir sous-estimé les impacts des travaux d’agrandissement sur l’habitat de nombreux poissons, dont l’esturgeon et le bar rayé. Il mentionne que le promoteur souhaite empiéter sur le fleuve Saint-Laurent sur une surface de 17 hectares, soit l’équivalent de 34 terrains de football.
Christian Simard affirme que les quelques mesures d’atténuation proposées par l’administration portuaire ne régleront pas le problème à 100 %, comme elles le laissent entendre.
L’environnementaliste s’inquiète également de l’impact qu’aura le projet d’agrandissement du port de Québec sur la sécurité des citoyens puisque la quantité de matières dangereuses qui y sont transbordées va augmenter.
Comme elles devront être transportées à l’extérieur du port par voie terrestre, Christian Simard appréhende une hausse du transport ferroviaire de matières dangereuses dans les quartiers centraux de Québec.
Il reproche à l’administration portuaire de ne pas avoir pris en compte les impacts de son projet à l’extérieur des limites du port.
Retombées économiques exagérées
Christian Simard émet par ailleurs de sérieuses réserves sur les retombées économiques du projet d’agrandissement.
« La seule étude que le Port a déposée, c’est une étude de retombées économiques qui était gonflée aux hormones dans le sens qu’elle est sur des investissements de 590 millions, alors que le projet déposé à l’agence est de 190 millions. »
Selon lui, la justification économique du projet n’a pas été démontrée. Il souligne que l’évaluation préparée par le Port de Québec ne contient aucune analyse des coûts et des bénéfices et aucune étude de marché.
Le mémoire d’une centaine de pages de Nature Québec sera déposé aujourd’hui auprès de l’Agence canadienne d’évaluation environnementale.
Le projet de 190 millions Beauport 2020, qui vise l’agrandissement du port vers l’est, comprend le prolongement d’un quai, le réaménagement de la baie de Beauport, des installations ferroviaires pour assurer le transport du vrac transbordé au port. L’Administration portuaire de Québec considère ce projet important pour assurer son développement et celui de la ville de Québec.