Annie Morin, Le Soleil, publié le 01 février 2017
(Québec) Plusieurs citoyens présents à la première séance de consultation publique de l’Agence canadienne d’évaluation environnementale (ACEE) ont déploré le fait que le projet d’agrandissement du Port de Québec sera évalué sans savoir quels types de produits y seront transbordés et quel volume de trafic maritime et ferroviaire sera généré.
Les représentants de l’agence fédérale et de l’Administration portuaire de Québec (APQ) ont dû faire face à une salle comble mercredi soir à l’hôtel Ambassadeur de Beauport. Environ 200 citoyens étaient présents, dont plusieurs arborant un t-shirt jaune avec l’inscription «Sauvons la baie de Beauport».
Après une courte présentation du projet et de la démarche de l’ACEE, une quinzaine ont eu le temps de poser leurs questions. Plusieurs portaient sur l’aménagement du quai multifonctionnel à construire dans le secteur Beauport.
Pour les besoins de l’étude d’impact environnemental, un «scénario hypothétique» présenté comme plausible et conservateur a été utilisé. Il prévoit que le tiers du site soit consacré au vrac liquide, un autre tiers au vrac solide et un dernier tiers aux marchandises générales en conteneurs.
Le président-directeur général du Port, Mario Girard, a admis que cela pourrait varier en fonction des opérateurs qui seront recrutés. Il a toutefois assuré au représentant du mouvement Stop Oléoduc de la Capitale-Nationale, Denis Desmeules, qu’il n’était pas question d’un terminal pétrolier. Il a même ajouté qu’il ne voyait pas le duc-d’Albe, un quai en eaux profondes pour le vrac liquide, «dans l’horizon que je peux imaginer le plus loin possible».
Impacts environnementaux
Suzanne Lemire, qui est associée au Groupe d’initiatives et de recherches appliquées au milieu (GIRAM), a demandé à l’ACEE comment elle pouvait faire le tour des impacts environnementaux du projet sans avoir une idée claire de ce qui va s’y installer et s’y faire. La chargée de projet Céline Lachapelle a répondu que l’évaluation porte sur le projet déposé par le promoteur et qu’advenant une modification des usages, l’Agence pourrait s’y repencher et ajuster ses recommandations. Le dernier mot revient toujours à la ministre fédérale de l’Environnement.
Le Port s’est montré disposé à revenir vers le fédéral et a répété qu’il consultera la population via son Processus environnemental de participation citoyenne (PEPC), qu’il a créé et qu’il administre.
Xavier Robidas, du Comité de vigilance ferroviaire de Limoilou, s’est aussi montré inquiet de l’augmentation du trafic ferroviaire en dehors des terrains portuaires, qui n’est ni quantifié ni qualifié. Transports Canada, de qui relève la circulation hors du site, a indiqué qu’il n’était pas requis que le Port en fasse l’étude.
Retombées économiques
Les retombées économiques ont également fait jaser. L’organisme Accès Saint-Laurent Beauport conteste les calculs du Port – qui promet 100 millions $ de retombées économiques et 1000 emplois par année – et propose ses propres chiffres, cinq fois moins élevés. Son porte-parole, Daniel Guay, a demandé si l’ACEE comptait retenir les services d’un économiste indépendant pour trancher la question. La réponse est non.
Christian Simard, directeur général de Nature Québec, a également contesté le fait que les retombées économiques sont calculées pour un site complètement aménagé, un investissement totalisant 490 millions $, tandis que les effets environnementaux sont étudiés pour les premiers aménagements de 190 millions $. «De quel projet on parle?» a demandé M. Simard, qui considère que le processus est «vicié».
La consultation se poursuit jeudi en après-midi et en soirée au même endroit.