Annie Morin, Le Soleil, publié le 10 juin 2015
(Québec) L’opposition à l’hôtel de ville de Québec est convaincue que l’agrandissement du port de Québec servira à l’exportation du pétrole canadien issu des sables bitumineux. Le chef Paul Shoiry réclame «la vérité» sur le projet et un examen par le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE).
Démocratie Québec se base sur une étude de la Société de développement économique du Saint-Laurent réalisée en collaboration avec Transports Canada en 2008, puis actualisée en 2013, pour conclure que «l’objectif du Port est donc d’être la sortie stratégique du pétrole des sables bitumineux de l’Alberta sur le fleuve Saint-Laurent».
Cette étude sur le Corridor de commerce Saint-Laurent-Grands Lacs faisait état des «nouvelles possibilités d’exportation» des produits pétroliers de l’Ouest canadien. Il était question de promouvoir la «solution de l’Est» à l’autre bout du pays.
Depuis, l’Administration portuaire de Québec (APQ) a levé petit à petit le voile sur son projet d’agrandissement de plusieurs centaines de millions de dollars. La première version incluait un quai en eau profonde de type duc-d’Albe qui aurait permis de charger ou décharger du vrac liquide sans toucher la côte. Le site Web parlait d’une «solution compétitive pour le Port de Québec afin de devenir un point de sortie pour les exportations de produits pétroliers canadiens».
Mais dernièrement, le président-directeur général du Port, Mario Girard, a exclu cette possibilité. Le duc-d’Albe est désormais prévu dans une seconde phase de développement dont l’échéancier n’a pas été précisé.
M. Shoiry remet en question cette version: «Nous, on pense que c’est pour le pétrole. On ne croit pas qu’il y aura des installations aussi importantes, des réservoirs aussi importants pour autre chose que du pétrole.» Il n’a pas été jusqu’à dire que le Port ment, mais bien qu’il «ne dit pas toute la vérité».
Le conseiller municipal de Saint-Louis-Sillery a précisé qu’il n’était pas contre l’agrandissement des installations portuaires, «au contraire», car il reconnaît au site un bon potentiel de développement économique. «Mais ça doit se faire dans un environnement sécuritaire, ça doit se faire dans un environnement ouvert et transparent. Et c’est pour ça que ça prend un BAPE», a-t il ajouté, inquiet notamment pour les citoyens qui vivent en bordure de la voie ferrée dans Sainte-Foy, Vanier et Limoilou.
Examen du BAPE
Démocratie Québec rejoint ainsi la position du gouvernement du Québec, qui tient à l’examen du BAPE, et se demande pourquoi le maire Régis Labeaume n’a pas posé la même condition avant d’appuyer le projet d’agrandissement du Port. «On parle de choses qu’on ne sait pas et on dit oui», dénonce le conseiller municipal de Montclam-Saint-Sacrement, Yvon Bussières.
Pour son collègue Shoiry, le processus d’évaluation environnementale présenté récemment par l’APQ n’est pas suffisant, bien qu’il inclue des consultations publiques. «On comprend les bonnes intentions de M. Girard, mais on peut pas à la fois dire qu’il y aura une évaluation environnementale indépendante et en même temps dire que c’est la personne que nous, on engage et on paie» qui fera le travail, dit le politicien. «Il faut arrêter de laisser le Port se gérer comme s’il était un pays», insiste-t-il.