64 piscines olympiques de carburant dans leur cour: un projet de terminal d’hydrocarbure inquiète des résidents du secteur de Montréal-Est

Anne Caroline Desplanques, Journal de Québec, 16 décembre 2017

Des citoyens de Montréal-Est dénoncent un projet qui prévoit l’installation de gigantesques réservoirs de carburant d’aviation à seulement 800 mètres des maisons.

« C’est un non-sens d’installer ça là, c’est bien trop près des habitations, imaginez s’il y avait un accident », gronde Vincent Marchione, du regroupement citoyen Comité de vigilance environnementale de l’est de Montréal.

Ce nouveau terminal permettrait à terme d’entreposer 164 millions de litres de carburant de type Jet-A et Jet-A1 près de l’avenue George-V et du fleuve Saint-Laurent, à Montréal-Est.

Le promoteur, un consortium de compagnies aériennes appelé Corporation internationale d’avitaillement de Montréal (CIAM), souhaite ainsi approvisionner en carburant les aéroports de Montréal, de Toronto et d’Ottawa.

Le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) tient actuellement une période de consultation sur le projet et organisera une séance d’information publique à Montréal-Est le 19 décembre.

Accumulation de risques

« Il n’y a pas de risque pour les résidences avoisinantes », assure Matthew McKernan, directeur environnement à la CIAM. Il explique que le Jet-A et le Jet-A1 sont des substances reconnues pour être plus sécuritaires que le kérosène, un carburant d’aviation plus connu.

Le regroupement de citoyens craint cependant un effet domino en cas d’accident, sachant qu’il y a une accumulation d’industries lourdes à haut risque dans le secteur.

Se voulant rassurant, M. McKernan affirme que les conséquences d’un incident seraient contenues à l’intérieur du terrain de CIAM grâce à une cuvette de rétention étanche et à une digue

Mais M. Marchione a de sérieux doutes. En plus d’incendie, il craint une contamination du Saint-Laurent. «On a vu plusieurs réservoirs de ce type qui ont eu des fuites. Tout ça pourrait couler dans le fleuve », explique-t-il, inquiet pour l’approvisionnement en eau potable de la région métropolitaine.

Vieux pipeline

CIAM prévoit que le carburant lui soit livré par des bateaux-citernes en provenance de Québec et de l’étranger. Il serait ensuite distribué, notamment à l’aide du pipeline Trans-Nord qui traverse de nombreux cours d’eau, dont la rivière des Outaouais, en amont des prises d’eau potable de la métropole québécoise.

Or, la conduite de Trans-Nord, qui date de 1952, « a eu des ratés majeurs en termes de sécurité », rappelle Patrick Bonin, de Greenpeace. Depuis 2008, l’entreprise est responsable de 6 des 13 incidents liés à l’exploitation des pipelines au Québec.

Le problème est tel que deux commissaires de l’Office national de l’énergie ont réclamé sa fermeture temporaire en 2016, car Trans-Nord a omis d’effectuer plusieurs travaux pour assurer la sécurité de l’infrastructure.

Le gros de la distribution s’effectuera toutefois par train. CIAM prévoit en effet livrer les trois quarts du carburant qu’elle stockera à Montréal par voie ferroviaire jusqu’à l’aéroport Pearson, à Toronto, dit M. McKernan.

Il explique qu’actuellement le carburant est déjà transporté jusqu’à Toronto par train, mais à partir de Québec. Un terminal à Montréal-Est permettra donc de diminuer le transport entre Québec et Montréal. Environ 10 000 wagons-citernes de moins devraient circuler sur cette ligne chaque année, calcule CIAM.

Mais M.Marchione souligne qu’à partir de Montréal, les trains « vont traverser des quartiers densément peuplés». « On n’est pas à l’abri d’un déraillement », prévient-il.

LE PROJET CIAM EN BREF

  • 8 réservoirs d’une capacité de 160 millions de litres
  • 1387 à 1858 millions de litres de carburant y transiteraient chaque année
  • Carburant livré sur place par bateaux-citernes, puis expédié par barges, pipeline, trains et camions
  • 6 voies ferrées pouvant supporter 52 wagons reliées à la voie du CN
  • 5 km de pipeline relié à celui de Trans-Nord qui dessert déjà les aéroports

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