L’oublié du 375e de Montréal

François Cardinal, La Presse, publié le 20 mai 2017

L’histoire de Montréal a commencé sur le bord du fleuve. Et pourtant, c’est le grand oublié des fêtes du 375e anniversaire.

On s’est pâmés avec raison devant l’éblouissante illumination du pont Jacques-Cartier. On s’est réjoui que la métropole mette à profit ses talents locaux pour se doter d’une signature moderne à l’image de sa grande créativité.

N’empêche, l’embellissement du pont qui enjambe le fleuve nous rappelle l’existence… du fleuve, justement.

Un fleuve auquel on n’a toujours pas accès au cœur de Montréal ! Pas possible de le longer à pied ou à vélo entre les ponts Champlain et Jacques-Cartier. Pas même possible de s’en approcher véritablement, encore moins de s’y baigner.

Pourtant, c’est en mettant le pied sur les berges de ce majestueux cours d’eau que Maisonneuve a entamé l’histoire de Montréal, le 17 mai 1642. Une histoire à laquelle le fleuve a toujours été étroitement lié, que ce soit par le transport de marchandises, l’approvisionnement en eau ou la villégiature riveraine d’antan.

Plusieurs l’ont oublié, mais il y a à peine 60 ans, il y avait tout près de 60 plages ouvertes à la baignade à Montréal. Puis, au fil des ans, l’eau du fleuve s’est polluée, les berges se sont détériorées et les plages ont été presque toutes fermées, si bien que l’île s’est recroquevillée sur elle-même. Comme si elle avait coupé le cordon ombilical qui la relie au fleuve.

Ce dernier n’a tout de même pas disparu de l’imaginaire, bien sûr. Deux plages excentrées permettent d’en profiter. Des autres vont s’ajouter, notamment à Verdun. Et on soigne de plus en plus ses abords, que ce soit par la mise en valeur du pont Jacques-Cartier, la revitalisation du parc Jean-Drapeau ou la construction de la future gare maritime dans le Port.

On va même profiter de l’aménagement de ce nouveau terminus des croisières pour créer un espace vert abaissé au bout du quai Alexandra. Bien !

Mais ce ne sera hélas qu’une lucarne sur le fleuve… alors que Montréal a promis à plusieurs reprises l’ouverture de « fenêtres » sur ce cours d’eau nettoyé à coups de milliards de dollars.

« Nous savons que nous avons une eau de qualité et que la baignade est possible, disait le maire Coderre en 2015, alors il est temps d’en redonner l’accès aux Montréalais. »

On s’engageait alors à implanter un bain portuaire au bout du quai de l’horloge, comme à Copenhague, un legs du 375anniversaire qui fait d’ailleurs toujours partie de la liste officielle. Les études sont en cours…

Même chose pour le parc linéaire qu’on souhaite implanter sur le littoral entre les ponts Champlain et Victoria, juste au sud de l’autoroute Bonaventure. Les discussions sont en cours…

Même chose, par ailleurs, pour le parc-plage du Grand Montréal, un superbe projet piloté par la Communauté métropolitaine le long de la digue qui s’étend de Saint-Lambert à Sainte-Catherine. Les études se poursuivent…

Quant à l’imposante promenade riveraine qu’on prévoyait aménager autour des îles Sainte-Hélène et Notre-Dame, elle a été mise de côté au profit d’un réaménagement mineur par l’administration Coderre.

Si bien que 2017 a beau être bien entamée, on se tient toujours loin de ce fleuve duquel est pourtant né Montréal il y a maintenant 375 ans.

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